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http://sboisse.free.fr/science/physique/relativite.php
Auteur: Serge Boisse
Date: Le 27/03/2023 à 18:03
Type: web/MOC
Tags: physique,relativité
pub: oui
commentaires: oui
Tout le monde connaît de nom la théorie de relativité mais peu de gens savent l'expliquer simplement. C'est dommage ! C'est pourquoi je vais essayer de le faire dans cette page.
En fait il y a deux théories de la relativité, toutes deux dues au grand Albert (Einstein) : la relativité restreinte (qui date de 1905) et la relativité générale(1915). On va commencer par la relativité restreinte, qui est (beaucoup) plus simple. Mais pas d'affolement, je vais vous expliquer tout ça sans prise de tête, vous allez voir !
Albert en eut l'idée alors qu'il faisait l'école buissonnière (Eh oui, c'était un mauvais élève !) , en arpentant l'Italie du Nord à vélo. Il savait que la vitesse de la lumière était finie. C'était un fait connu depuis longtemps : dès 1676, on avait tenté de la mesurer. Vous vous direz, comment pouvait-on mesurer un truc aussi rapide (près de 300 000 Km par seconde, ce n'est pas rien !) avec les instruments dont on disposait au XVIIe siècle ?
Il suffisait de penser à l'astronomie : On savait déjà (plus ou moins) prédire les mouvements des corps célestes, et en particulier celui des satellites de Jupiter. En particulier, l'un de ces satellites, Io, tourne autour de Jupiter en passant tantôt devant lui (vu de la Terre), tantôt derrière lui. On pouvait donc prédire l'instant exact des éclipses de Io par Jupiter. Mais quand Io passe derrière Jupiter, il est plus loin de nous que quand il passe devant : si la vitesse de la lumière est finie, on devrait donc voir l'éclipse, au télescope, avec un retard de quelques minutes sur le moment déterminé par le calcul.
En fait ce retard est de 8 minutes, parce que la lumière met justement huit minutes pour aller de la position "derrière Jupiter" à la position "devant Jupiter". Vous me suivez ? Connaissant le rayon de l'orbite de Io autour de Jupiter, on pouvait donc calculer la vitesse de la lumière. Au XVIIe siècle la mesure n'était n'était pas très précise, mais maintenant on sait que la lumière a une vitesse de 299 792, 458 km par seconde exactement.
Le jeune Albert savait tout cela, mais il s'est posé la question : que se passerait-il si cette vitesse était bien plus faible, disons de quelques mètres par seconde seulement ? Est-ce que l'on pourrait se déplacer plus vite qu'elle, et que se passerait-il alors ? Qu'est ce que l'on verrait ? Telles étaient les questions qui tarabustaient le jeune Einstein. (Vous me direz qu'il aurait pu penser aux filles au lieu de ça, mais on aurait été privé de l'une des plus belles théories de la science ; et puis rien ne nous dit qu'il ne pensait pas aux filles aussi ;-)
Bon si dit notre jeune Albert, une vitesse, c'est une distance divisée par un temps. Mais qu'est ce que le temps ? Et, plus important, est-ce que le temps s'écoule à la mème vitesse partout ?
Alors là, se poser une question pareille, ça prouvait bien qu'Einstein était un mauvais élève : Tout le monde savait (ou croyait savoir !) depuis Isaac Newton, que le temps était absolu : Une horloge, c'est une horloge, et elle bat à la même vitesse quel que soit le référentiel (l'endroit) où on la place.
Soudain, devant le petit Albert qui roulait tranquillement à bicyclette sur une route déserte de Toscane, le long d'une voie ferrée, se dressa le fantôme d'Isaac Newton ! Albert serra les freins à mort et le vélo s'arrêta pile devant le fantôme, qui n'attendait que ça :
- Alors, impudent jeune homme, fit-il dédaigneusement, on conteste ma magnifique théorie du temps absolu ? Ça n'a aucun sens ! Si deux horloges vont à la même vitesse lorsqu'elles sont au même endroit, elles iront encore à la même vitesse si on les sépare, un point c'est tout !
- Oui, oui, dit Albert, nullement désemparé, mais comment pouvez-vous savoir que les deux horloges vont à la même vitesse, si elles sont loin l'une de l'autre ? Ou, encore plus simplement, que deux évènements, disons deux éclairs, très éloignés l'un de l'autre, sont simultanés ?
- Ah,Ah, répond l'esprit de Newton, c'est très simple ! Tu places une horloge ultra précise à coté de chaque éclair, tu t'arranges pour que les deux horloges aient été auparavant calées à la même heure exactement, tu mets un observateur à coté de chaque horloge, et si les deux horloges marquent la même heure (et la même minute, et la même seconde, etc.) au moment des éclairs, c'est qu'ils ont eu lieu au même moment, donc qu'ils sont simultanés ! Un enfant comprendrait ça !
Mais le jeune Einstein n'était pas n'importe quel enfant :
- Oui, répondit-il, mais non ! Dans votre expérience, vous supposez d'abord que le temps est absolu, puis vous montez une expérience qui utilise cette supposition pour prouver que... le temps est absolu. Ça ne prouve absolument rien ! Ce qu'il faut, c'est une définition de la simultanéité qui n'utilise pas des horloges. Comme ça, on pourra montrer si le temps est vraiment absolu... Ou pas ! Eurêka ! J'ai trouvé ! On...
- M'étonnerait qu'un gamin comme toi ait trouvé la solution à un problème, qui n'en n'est pas un, d'ailleurs !
Albert ignora l'interruption :
- ...On place un unique observateur entre les deux évènements, exactement au milieu ; il dispose de deux miroirs inclinés à 45°, qui lui permettent d'observer les deux évènements. Si les deux évènements sont simultanés, l'observateur verra les deux flashes se produire en même temps. Et même, on peut prendre ça comme une définition de la simultanéité : Si les deux éclairs sont vus en même temps par l'observateur situé au milieu, alors les deux évènements sont simultanés. Vous acceptez cela, Monsieur Newton ?
- Quel coupeur de cheveux en quatre, répondit le fantôme d'Isaac Newton.
- Oui, mais est-ce que vous acceptez cette définition de la simultanéité ?
- Grmmpf... Bof.... Si ça peut te faire plaisir...
- Mais vous êtes d'accord, n'est ce pas ? Si nous sommes exactement au milieu entre deux évènements distants, et que nous les voyons en même temps, ils seront simultanés selon notre définition ?
- Quelle perte de temps ! Un jeune homme comme toi devrait plutôt s'intéresser aux filles ! Moi, à ton âge...
- Mais vous êtes d'accord ?
- Oui, oui, mais cela ne sert à...
Le petit Albert n'attendait que ça :
- Alors, si ça ne vous fait rien, je vous propose une expérience de pensée...
- Une expérience de pensée ? Qu'est ce que c'est que ce truc bizarre ? Une expérience, ça se fait dans un laboratoire, avec des éprouvettes, des alambics, des cornues, et aussi des prismes, des tas de trucs en cuivre bien brillants, comme moi lorsque j'ai démontré que la lumière blanche pouvait être décomposée en toutes les couleurs de l'arc en ciel, et que...
- Bien sûr, bien sûr, Isaac, répondit hâtivement Albert, je ne voulais pas vous vexer, Je pensais simplement à une expérience qui pourrait être réelle, mais qui demande de tels moyens que c'est difficilement réalisable en pratique. On va juste imaginer cette expérience, et si vous êtes d'accord sur le principe, rien n'empêchera de la faire en réalité...
- Pff !
- Bon alors vous voyez cette voie ferrée toute droite, le long de la route ? On va imaginer que deux éclairs vont tomber sur le talus de la voie, l'un en un point A à gauche de nous, disons à un kilomètre, et l'autre en un point B à droite de nous, à un kilomètre aussi. Nous, nous serons pile au au milieu. Nous installons deux miroirs inclinés à 45°, qui vont nous permettre de voir en même temps les deux endroits où les deux éclairs vont se produire. Si nous voyons les deux éclairs en même temps, ils seront simultanés pour nous.
- Quoi ? Qu'est-ce que ça veut dire, simultanés pour nous ? S'exclama Newton. S'ils sont simultanés, ils sont simultanés, un point c'est tout !
- Eh bien, monsieur Newton, Imaginez un train très long, long de deux kilomètres en fait, qui circulera le long de la voie.
- Un train de deux kilomètres de long ! Mais jamais vous ne pourrez mettre assez de chevaux pour le tirer !
- Euh oui, monsieur Newton, mais depuis votre... euh... mort, on a inventé des tas de choses, et entre autre la machine à vapeur, qui...
- Machine à vapeur ? Fariboles ! Enfin, admettons...
- Moi, je vais rester sur le talus, et vous, vous allez monter à bord de ce train, vous vous installerez - confortablement - dans la voiture du milieu, et vous vous trouverez en fait exactement en face de moi, au moment où...
- J'espère qu'il y a un bon service à bord dans cette voiture ! En fait, j'aurais bien besoin d'un petit sherry, avec tous ces...
- Le service à bord sera parfait, Monsieur Newton, puisque c'est une expérience de pensée. Ce qui importe, c'est que l'éclair A se produira au niveau de la voiture de queue, l'éclair B se produira au niveau de la voiture de tête, et vous, vous serez au milieu, avec, comme pour moi qui serai resté sur le talus, un système de miroir qui vous permettra d'observer les deux éclairs.
Isaac Newton réfléchit un instant, puis sans se démonter monta sur la voie, laissant Albert Einstein sur le talus.
- Voila, on imagine que moi je suis dans le train, et toi, tu es sur le talus, pauvre jeune piéton. C'est bien ça ?
Albert souris pour la première fois.
- C'est bien ça, monsieur Newton. Donc deux éclairs tombent sur le talus, et moi, situé au milieu, sur le talus également, et exactement entre les points où sont tombés les deux éclairs, je les vois en même temps. Je peux donc dire qu'ils ont été simultanés. Vous êtes d'accord ?
- Évidemment ! Je suis quand même un scientifique, jeune homme !
- la question, reprit Einstein sans se laisser impressionner, est : est ce que les deux éclairs seront simultanés pour vous ?
- Naturellement qu'ils le seront, puisque le temps est absolu ! Franchement, je perds mon temps avec toi, jeune homme !
- Oui mais réfléchissez : êtes vous sûr que vous, dans le train, vous verrez les deux éclairs en même temps ?
- Bien sûr !
- Ah monsieur Newton, je suis désolé, mais vous vous trompez ! Ce serait le cas si la vitesse de la lumière était infinie, mais ce n'est pas le cas, cela a été démontré de votre vivant !
- Et alors ?
- Alors, la lumière de chacun des deux éclairs va converger vers vous à une vitesse finie. Très grande, je vous le concède, mais finie. Elle va donc mettre un certain temps à vous atteindre. Et pendant ce temps, puisque vous êtes dans le train, vous vous serez déplacé... Ce qui veut dire que la lumière provenant de l'éclair qui a frappé le point A à l'arrière du train va va vous arriver après la lumière provenant de l'éclair B à l'avant du train ! En d'autre termes, vous verrez l'éclair B un peu avant l'éclair A : Pour vous, les deux évènements n'auront pas été simultanés !
- Aaaaaaaaarg !
Le fantôme d'Isaac Newton se prit la tête entre les mains, visiblement désemparé :
- Je n'ai pas eu aussi mal à la tête depuis le jour où une pomme m'est tombée sur la figure, jeune homme !
- Donc, poursuivit Albert, en fait le temps n'est pas absolu : il est relatif. Il dépend de l'observateur. Si deux observateurs sont en mouvement l'un par rapport à l'autre, ils n'auront pas la même vision de la simultanéité. Pour un observateur, un évènement A peut s'être produit avant un évènement B, et pour un autre observateur, ce peut être le contraire !
- Mais dites moi, impertinent jeune homme, c'est le principe de causalité, que vous mettez ainsi à mal ! C'est impossible, c'est l'un des principes les plus sacro-saints de toute la physique !
- Le principe de causalité ?
- Oui, le principe selon lequel les causes doivent précéder les effets ! sans lui, on pourrait faire des voyages dans le temps, ce qui est évidemment impossible !
Albert réfléchit :
- Ah mais ce principe n'est pas remis en cause par ma petite démonstration ! Deux évènements peuvent avoir un ordre différent selon l'observateur, mais seulement s'ils sont suffisamment éloignés pour que, justement, l'un ne puisse pas être la cause de l'autre. Pour qu'une cause produise un effet, il faut que la lumière ait eu suffisamment de temps pour se propager de la cause vers l'effet...
- Comment cela ?
- Prenez le flash de l'éclair A. Sa lumière se propage sous la forme d'une sphère de plus en plus grande. Mais c'est parce que nous sommes dans un monde à trois dimensions. Si notre monde avait deux dimensions, comme la surface d'un lac, les ondes lumineuses seraient comme la vague circulaire que l'on produit lorsqu'on jette un caillou dans l'eau : un cercle qui s'élargit avec le temps.
- Oui, et alors ?
- Si nous représentons le temps par un axe vertical, et l'espace par un plan horizontal, les cercles de plus en plus grand tracent en fait un cône, que j'appellerai le cône de lumière futur. L'évènement A est en bas du cône. Tout ce qui est dans le cône peut être influencé causalement par l'évènement A. De même, il existe un cône de lumière passé. Seuls les évènements qui se trouvent dans le cône inférieur peuvent influencer l'évènement A. Tout ce qui se trouve en dehors du cône ne peut ni influencer A, ni être influencé par lui. C'est ce que j'appellerai l'"ailleurs". Dans notre expérience du train, l'éclair B se situe en fait dans "l'ailleurs" de l'éclair A, et réciproquement. C'est pourquoi ils peuvent être vus dans un ordre différent par deux observateurs - Vous et moi - Sans que cela remette en cause le principe de causalité. Vous comprenez ?
- Naturellement, je comprends ! Il y a en fait deux cônes de lumière, celui de l'éclair A, et celui de l'éclair B. Chacun est dans l'ailleurs de l'autre, ce qui explique pourquoi, étant dans le train, je peux voir l'éclair B avant l'éclair A, alors que vous vous les voyez tous les deux en même temps. Et seuls les évènements qui sont dans la zone commune aux deux cônes peuvent être influencés par les deux éclairs.
- Voila, voila, c'est ça ! Vous êtes un génie, monsieur Newton !
- N'exagérons rien, dit Newton modestement, tout le mérite t'en revient, gamin. Mais c'est vrai, j'aurais dû y penser plus tôt. Peut être que si les trains avaient existé à mon époque...
- Certainement, certainement, dit Einstein précipitamment.
- Mais dis moi, jeune homme une question me tarabuste.
- Oui ?
- Si deux évènements simultanés pour vous ne le sont plus pour moi, en quoi consiste la différence ? Peux-on la calculer ?
- Euh... Je vais essayer...
- Essaye gamin, essaye... Peut-être que tu deviendra aussi célèbre que moi, qui sait ? Mais ça m'étonnerait !
Sur ce, le fantôme de Newton disparût, laissant le jeune Albert passablement perturbé, au point que pendant tout le reste de sa vie il en oublia de se coiffer. Mais la suite est une autre histoire...
Eh oui, Le petit Albert devint célèbre, parce qu'il parvint à résoudre le problème posé par Newton. Pour cela, il posa un principe qui devint célèbre sous le nom de "principe de relativité", et qui s'énonce ainsi :
Les lois de la physique doivent s'appliquer de la même façon quel que soit le référentiel dans lequel se trouve l'observateur, et en particulier même si cet observateur est en mouvement par rapport au phénomène étudié.
Comme cela semble apparemment faux pour des référentiels en rotation, ou accélérés les uns par rapport aux autres (à cause de la force centrifuge ou de l'inertie), Einstein dériva un principe plus simple de ce principe très général : le principe de relativité restreinte :
Les lois de la physique doivent s'appliquer de la même façon quel que soit le référentiel dans lequel se trouve l'observateur, du moins tant que cet observateur est en mouvement rectiligne uniforme par rapport au phénomène étudié.
Plus tard, Einstein trouva quand même le moyen d'appliquer le premier principe, qu'il baptisa pour le coup "principe de relativité générale". Mais on verra ça plus tard. Pour le moment, le principe de relativité restreinte seul nous suffit pour étudier l'expérience du train et des éclairs, puisque le train est en mouvement rectiligne uniforme par rapport au talus.
Einstein chercha et chercha encore, et finit par tomber sur une transformation (un groupe d'équations) qui avait été découverte, dans un cadre différent, par un hollandais nommé Hendrick Lorentz. Et précisément cette transformation résolvait le problème ! Einstein se mit donc en devoir de prouver que la transformation de Lorentz était la forme la plus générale possible d'un système d'équations applicables à l'exemple du train (et plus généralement, à tout observateur en mouvement uniforme). Et il parvint à le prouver. Dans sa démonstration historique, toutefois, Einstein utilisa une chose qui, on le découvrit beaucoup plus tard, n'était pas indispensable : la constance de la vitesse de la lumière.
Quésako ? Eh bien c'est le fait (vérifié expérimentalement) que la lumière n'obéit pas à la loi d'addition des vitesse : Lorsque je mesure la vitesse de la lumière, quel que soit mon propre mouvement, je trouve toujours la même vitesse. Qu'elle soit mesurée sur la terre ou dans une station spatiale en orbite, on trouve toujours la même valeur. Or si je mesure la vitesse de la lumière provenant, disons, du soleil, on devrait (d'après Newton et Galilée !) trouver que la vitesse est différente lorsque je la mesure au sol ou dans un vaisseau spatial, puisque la vitesse de ce dernier devrait s'ajouter à celle de la lumière lorsque le vaisseau se dirige vers le soleil, et se retrancher lorsqu'elle s'en éloigne. Or ce n'est pas ce qu'on observe !
Ce qu'Einstein ne savait pas, c'est qu'on peut trouver les équations de la relativité sans utiliser la constance de l avitesse de la lumière ! C'est un fait très peu connu, trop peu connu sans doute, et c'est pourquoi je vais vous donner très brièvement une idée de comment on peut dériver la transformation de Lorentz du principe de relativité restreinte, sans utiliser la constance de la vitesse de la lumière. Ensuite, mais seulement ensuite, je vous donnerai cette fameuse transformation de Lorentz et je vous dirai à quoi ça sert. Ben oui, c'est comme ça, comme ça vous aurez envie de lire jusqu'au bout !
L'idée de base, c'est que, en vertu du principe de relativité, les transformations possibles a priori entre le systèmes de coordonnées utilisé par le jeune Albert (sur le Talus) et celui utilisé par Newton (dans le train), doivent former ce qu'en mathématiques on appelle un groupe.
En clair, cela signifie que lorsque je considère non pas deux, mais trois référentiels A,B,et C (disons le talus, le train, et un second train lancé sur une voie parallèle mais à une vitesse différente), Lorsqu'on passe de A à B puis de B à C, on doit trouver le même résultat que lorsqu'on passe de A à C directement. Vous me suivez ? Quelque soit l'ordre dans lequel on applique les changement de référentiels, et même quelque soit le nombre de référentiels, on doit "retomber sur ses pattes". Et également lorsqu'on passe de A à B puis de B à A, ce qui semble tout à fait logique.
Or il y a un théorème intéressant en maths, et que ne connaissait visiblement pas Einstein, qui dit que lorsque l'on cherche un "groupe de Lie" sur un espace topologique donné, il n'y en n'a qu'un. Peu importe ce que cela veut dire, je vais vous donner des exemples.
Si je considère que les vitesses des objets, dans un monde "Newtonien" ne sont pas limitées, en d'autres termes qu'elles peuvent varier dans l'intervalle ]-∞, +∞[ c'est à dire de moins l'infini à plus l'infini (les vitesse sont positives pour un objet qui s'éloigne et négatives pour un objet qui se rapproche), alors le théorème dit que la seule transformation possible est la loi classique de l'addition des vitesses :
Si
Mais comme on l'a vu, la lumière n'obéit pas à cette équation, donc notre monde n'est pas comme cela.
Mais on peut imaginer des "mondes" bien plus étranges : imaginons par exemple un monde où l'on ne pourrait se déplacer que dans un seul sens, à une vitesse quelconque. Dans ce monde étrange, "l'espace des vitesse" est l'intervalle [0, +∞[ Et bien on démontre que dans ce monde, la seule "loi de composition des vitesses" possible est en fait... la multiplication :
Encore un monde, encore plus étrange : celui où les vitesses seraient contraintes dans l'intervalle ]-1, +1[ (en choisissant une unité de vitesse appropriée). On voit que dans ce monde, on ne peut jamais atteindre d'une "vitesse limite" qui vaut 1. On démontre alors que dans ce monde franchement bizarre, la loi de l'addition des vitesse serait :
C'est à dire qu'en composant la vitesse v du phénomène étudié avec la vitesse w du train, on trouve la vitesse
Et bien ce monde super bizarre, c'est le notre ! Eh oui, en choisissant une unité de vitesse qui serait telle que la vitesse de la lumière vaudrait 1, on tombe sur la transformation de Lorentz !
Appelons ]-1,1[
en posant
Finalement si on cherche la vitesse v' que l'on obtient dans le référentiel du train, et qu'il faut bien sûr diviser aussi par c pour la "contraindre" dans l'intervalle ]-1, 1[
on trouve :
Qui est la loi d'addition des vitesses trouvée (bien plus laborieusement) par Einstein. Notez que si la vitesse de la lumière était infinie, c'est à dire si on pose c = oo, alors on retrouve v' = u + u' qui est la loi classique (newtonienne) de composition des vitesses. Notez aussi que si les vitesses u et u' sont très petites (par rapport à c), alors le terme u.u'/c2 vaut presque zéro et que l'on retrouve aussi la loi classique d'addition des vitesses.
Pourquoi ne peut-on pas l'atteindre ? Regardez bien la formule ci-dessus : quelles que soient les valeurs que vous donnez aux vitesses u et u', tant que ces vitesses sont inférieures à c, le résultat v' ne dépassera jamais c. OK, OK, me direz vous, ça c'est une justification mathématique : mais qu'est-ce qui, physiquement, nous interdit d'atteindre (sans parler de dépasser) cette fameuse vitesse c de la lumière ? C'est une très bonne question et je vous remercie de l'avoir posée. Mais JOKER ! Je vous dirai ça tout à l'heure. Soyez patient !
Ensuite, parce que cette équation a été maintes et maintes fois vérifiée expérimentalement, et donc que notre monde est bien aussi "bizarre" que cela : il n'est pas newtonien, il est relativiste. Mais les "effets relativistes" commencent à se manifester seulement lorsque les vitesses considérées sont très grandes : tant qu'on n'atteint pas le dixième de la vitesse de la lumière (soit 30 000 km/s, soit mille fois plus que le plus rapide engin spatial humain), l'effet est inférieur à 1%.
Cela dit, il n'y a pas que la loi d'addition des vitesses qui soit bizarre. La transformation de Lorentz a des effets encore plus étranges : la contraction les longueurs, et la dilatation du temps.
Ouh là ! De quoi parlons-nous, là ? Bon eh bien je vais vous donner, brut de fonderie, les équations auxquelles a aboutit Einstein (et que l'on peut dériver assez facilement de l'équation ci-dessus pour l'addition des vitesses) :
si l'on mesure, relativement à un référentiel "au repos", une durée t0 pour un phénomène quelconque (disons, l'intervalle de temps entre deux éclairs successifs), un observateur en mouvement uniforme par à une vitesse v par rapport à ce référentiel mesurera, lui, une durée t qui vaut :
C'est ce qu'on appelle la dilatation du temps, parce que comme v < c, (puisqu'on ne peut pas dépasser la vitesse de la lumière), alors t > t0.
Le fait que t soit différent de t0 ne doit pas nous surprendre, puisque nous avons déjà établi (grâce à notre expérience du train) que des évènements simultanés pour un observateur ne le sont pas par rapport à un autre, s'il se déplace.
Cet effet a été prouvé expérimentalement : une horloge qui se déplace trés vite semble (pour nous) avancer plus lentement.
Il est très important de se rendre compte que cet effet est symétrique : Si l'observateur en mouvement mesure une durée t pour un phénomène, l'observateur au repos mesurera, lui, une durée supérieure ! En fait, c'est toujours un ralentissement du temps que l'on observe chez les autres. Cela semble paradoxal, mais cela ne l'est pas, nous allons l'expliquer un peu plus loin.
Autre effet, la contraction des longueurs : vu depuis un référentiel supposé fixe, un objet mobile de longueur L (mesuré dans son propre référentiel) apparait plus court dans la direction du mouvement. Plus précisément sa longueur apparente sera:
C'est à dire (puisque v < c), effectivement plus courte. Là encore, cet effet est symétrique : vu depuis le référentiel en mouvement, ce sont les objets du référentiels fixe qui apparaissent plus courts que lorsqu'ils sont mesurés dans le référentiel fixe !
Tout ceci parait bien bizarre, mais en fait tout se tient dans tout (et réciproquement, dirait Pierre Dac). Dans ce monde étrange où rien ne semble fixe et où toutes les grandeurs mesurées semblent dépendre de l'observateur, il y a quand même deux choses (en dehors de la vitesse de la lumière) qui restent constantes !
Mais quoi, me demandez vous ?
Et bien supposons un phénomène dont la durée est t, et les dimensions spatiales sont x,y, et z si on les mesure selon trois axes othogonaux. Alors la quantité
reste constante, quel que soit l'observateur, parce que justement la dilatation du temps "compense" d'une certaine manière la contraction de l'espace. Cette quantité s est la "mesure spatio-temporelle" de la taille du phénomène, dans un espace à 4 dimensions. C'est une mesure d'un intervalle d'espace-temps. Et ça, ça va nous entraîner dans le monde de la relativité générale. Mais avant, il faut que je vous parle de la célèbre formule E=mc2 (en fait,
...il nous faut expliquer la fameuse formule ! Pas de panique, on a fait le plus dur !
D'abord, souvenons-nous que, en physique classique aussi bien qu'en physique relativiste, on désigne en général par
Et bien, la seconde quantité qui ne varie jamais quel que soit le référentiel, c'est la quantité
que l'on appelle un rien pompeusement "norme du quadrivecteur énergie-impulsion"
Dit comme ça, ça fait un peu parachuté. Alors voila comment on y arrive :
à cause de la formule de composition des vitesses que nous avons démontré plus haut, la quantité de mouvement, en relativité, ne s'exprime pas par la formule simple
On appelle cette quantité de mouvement un peu charcutée l'impulsion. Pour de petites vitesses (petites devant c), l'impulsion est quasi égale à la quantité de mouvement.
Or il se trouve que l'orsqu'on communique une quantité de mouvement p à un objet qui a déjà une vitesse v, la variation d'énergie cinétique qui en résulte est v multiplié par la variation de la quantité de mouvement. C'est un fait qui ne doit rien à la relativité, mais qui résulte de lois de la mécanique classique dues à... Newton. En relativité, c'est donc l'impulsion que l'on doit utiliser. Donc on intégre (une opération mathématique que je n'expliquerai pas ici) et on trouve :
Quelle est la valeur de la constante ? Et bien si on veut que l'énergie cinétique soit nulle au repos, elle vaut forcément
Qui est l'expression de l'énergie en relativité.
Or lorsqu'on essaye de "developper en série" cette expression on trouve que
Pour de petites vitesses, les termes à partir de
Eh bien, nous dit Einstein, puisque ça ne dépend pas de la vitesse, c'est l'énergie que l'objet possédait déjà au repos. Et ça, c'était tout à fait nouveau !
L'énergie d'un objet au repos, c'est
Pourquoi cette formule est-elle si importante ?
Parce qu'elle montre que la matière peut être convertie en énergie (et réciproquement d'ailleurs). Avec les unités du système international, E est en Joules, m est en kilogrammes et c est en mètres par seconde : cela signifie qu'un Kg de matière contient une énergie de presque 1017 Joules ou si vous préférez cent millions de milliards de Joules. Or un Joule, faut-il vous le rappeler, c'est l'énergie que dépense (ou produit) une ampoule de 1 Watt en une seconde.
Autrement dit, avec l'énergie contenue dans un seul kilo de matière, on peut éclairer un million d'ampoules de 100 Watts pendant un milliard de secondes, c'est à dire pendant trente et un ans. Telle est la fantastique puissance de l'énergie nucléaire. Nucléaire, ça veut dire "qui vient du noyau". On parle évidemment du noyau de l'atome. Mais quel rapport entre le noyau de l'atome et notre formule, que, souvenons-nous, nous avons obtenue à partir de considérations sur la durée d'un évènement vu depuis un train ou vu depuis un le talus de la voie ferrée ?
Et bien il se trouve que lorsqu'on regroupe les noyaux de deux atomes "légers" pour former le noyau d'un un atome plus lourd, ou bien lorsqu'on casse un le noyau d'un atome "lourd" pour former deux atomes plus légers, le résultat est toujours plus léger que la somme des masses des noyaux de départ. Et la différence de masse dm est "magiquement" convertie en une énergie E, selon évidemment la formule E = (dm).c2 ; Le seul atome qui ne donne aucune énergie lorsqu'on le casse, ou lorsqu'on le reconstitue, c'est l'atome de Fer. Expliquer pourquoi ici dépasse un peu notre propos : il faudrait utiliser la théorie quantique (dont Einstein a été - aussi - un contributeur majeur) .
Toujours est-il que lorsque qu'on casse un noyau atomique plus lourd que le Fer (par exemple l'Uranium), on obtient deux fragments qui sont plus légers que l'atome initial. L'Uranium convient bien parce c'est un atome relativement facile à casser. Mais tout ça à a été découvert bien plus tard : la formule E = mc2 date de 1905, et les premiers essais de fission nucléaire (littéralement : cassage du noyau de l'atome) datent, eux, de 1940. En 1905, c'était révolutionnaire mais les gens se disaient "à quoi ça peut servir ?" La science a toujours été en avance sur la technique.
Mais revenons à nos moutons. Muni de la formule
Ce qui nous permet de connaître l'énergie ou l'impulsion d'un corps en mouvement.
Dans la formule :
Où m0 est la "masse au repos" de l'objet, et m la masse que l'on mesurerait depuis un référentiel dans lequel l'objet se déplace à la vitesse v (notons que ce peut être le même référentiel, une fois qu'on a accéléré l'objet). On voit que l'objet "rapide" est (semble) toujours plus lourd que l'objet au repos. Il faut faire attention, car il s'agit encore une fois d'un effet dû au changement de repère : en fait tout se passe comme si c'était l'inertie de l'objet qui augmentait.
Nous avons ici une explication physique de pourquoi un objet ne peut pas dépasser la vitesse de la lumière : en s'approchant de celle-ci, il devient de plus en plus lourd (en fait c'est son inertie qui augmente), de sorte qu'il devient de plus en plus difficile de le faire accélérer davantage. A la limite, l'inertie devient infinie et seuls des objets de masse nulle "au repos" peuvent aller à la vitesse de la lumière (c'est le cas des photons de la lumière).
Les physiciens on montré expérimentalement que cette formule s'applique bien à une particule que l'on tente d'accélérer dans un accélérateur de particules : en approchant de la vitesse de la lumière, elle "résiste" à l'accélération de la manière exacte prédite par la relativité.
Bon ! Et dire qu'Einstein a trouvé tout ça en une seule année, en 1905 ! Nous, nous savons qu'il avait été un peu aidé par le fantôme d'Isaac Newton, Mais curieusement je suis le seul à en parler ! D'ailleurs, ce même fantôme est réaparu, un peu plus tard, devant Einstein, cette fois pour parler de la gravitation et de ce que nous appellons aujourd'hui la relativité générale. Mais ceci est une autre histoire qui sera contée une autre fois, comme dirait Tolkien...
En attendant je vous met une vidéo sur la théorie de la relativité. Sympa, non ?
A voir aussi :
> La physique quantique pour les nuls
> Relativité fractale
> Le théorème du libre-arbitre
> Astronomie
> Cosmologie
> Maths !
> Technologie
Commentaires (97) :
Page : 1 2 3 [4] 5 6 7Le 10/11/2015 à 19h54
Le 09/11/2015 à 18h44
Le 06/11/2015 à 17h04
Le 03/11/2015 à 20h19
Le 04/09/2015 à 14h07
Dommage l'utilisation du mot "référentiel" semblant indiquer que c'est un "lieu", de quoi s'embourber avec le concept, et mélanger avec "repère" et "système de coordonnées".
Ce n'est pas du pinaillage...juste une critique que j'espère constructive (pour la rigueur, il faudrait modifier, ou expliquer l'emploi).
Le 02/09/2015 à 14h56
Le 19/06/2015 à 17h49
Mais si les vitesses peuvent s'additionner même lorsqu'elles sont proches de la lumière ! Simmplement il ne faut pas utiliser l'addition usuelle v' = u+u' mais la formule plus générale
v' = (u+u') / (1+u.u'/c2)
Le 11/06/2015 à 12h50
Le 09/06/2015 à 23h06
Le 09/06/2015 à 20h56
Le 27/05/2015 à 21h27
Le 15/05/2015 à 15h45
publiée en 1900 sous la forme M=E/c2 pour les ondes électro magnétiques?
Le 15/04/2015 à 17h32
"Or il y a un théorème intéressant en maths, et que ne connaissait visiblement pas Einstein, qui dit que lorsque l'on cherche un "groupe de Lie" sur un espace topologique donné, il n'y en n'a qu'un" est fausse. Remplacer $v+w$ par $f^{-1}(f(v)+f(w))$ ou f est une transformation inversible et bicontinue quelconque
Le 19/03/2015 à 12h00
Le 19/03/2015 à 11h58
bien sûr que la relativité sert à quelque chose ; le GPS par exemple.
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